Bouquet spirituel:
31 décembre
Sainte Colombe, née en Espagne, de parents idolâtres qui la persécutaient, vint chercher un refuge dans les Gaules pour y embrasser le Christianisme. Ce fut à Vienne, en Dauphiné, qu’elle reçut le baptême là on voit encore dans l’église des bénédictines, une chapelle qui porte cette inscription: Baptisterium Sanctæ Columbæ. Si partant des Pyrénées pour se rendre à Sens, par Vienne, on suit les voies romaines, on y trouvera un grand nombre de localités du nom de Sainte-Colombe, par lesquelles la sainte a dû passer et où sa mémoire est en grande vénération.
Le martyre de la jeune chrétienne, qui eut lieu vers l’an 279, eut un grand retentissement; sa jeunesse, son origine, les circonstances merveilleuses qui accompagnèrent son triomphe étaient bien propres à exciter l’admiration des hommes. Colombe eut la tête tranchée sur le bord d’une source aujourd’hui célèbre, qu’on appelle Fontaine d’Azon. Elle est située entre les villages de Saint-Clément et de Saint-Denis, au diocèse de Sens.
Avant de terminer ce cycle festival, il est bon de dire un mot sur un usage dont nous avons cité de nombreux exemples. Déjà nous avons vu les fontaines de sainte Geneviève, de sainte Solange, de sainte Godelieve, de sainte Clotilde, de sainte Reine, etc.; mais si l’on parcourait la vie des saints et les coutumes religieuses particulières à chaque province, on ne tarderait pas à être frappé ae cette multitude de sources et de fontaines placées sous la garde du saint patron de l’endroit, et auxquelles les populations attribuent des propriétés remarquables.
Dès la plus haute antiquité, nous remarquons ce privilège qu’ont eu certaines fontaines d’attirer la vénération des peuples. «Le culte de l’eau, dit Saint-Grégoire de Tours, était une partie essentielle de la religion des Celtes. Ce culte de l’eau subsista dans les Gaules longtemps même après que le christianisme y eut été établi.» On comprend, en effet, que ces eaux possédant pour la plupart des qualités bienfaisantes, l’Église dut prendre le sage parti de faire tourner à la gloire de Dieu, les pratiques mêmes de l’idolâtrie, en plaçant ces fontaines sous la protection d’un Saint. Il est incontestable que ces glorieux patrons se sont plu à témoigner que ce culte leur était agréable par les guérisons extraordinaires qui s’y sont maintes fois opérées.
C’est à la vierge Marie que le plus grand nombre de ces fontaines est consacré. Autrefois, on croyait que les anges chantaient eux-mêmes au bord des sources que sanctifiait l’image de leur Reine. Pour en revenir à la Fontaine d'Azon, nous voyons en 620, Clotaire élever en cet endroit le royal monastère de Sainte-Colombe-lez-Sens.
Au XIe siècle, On y éleva une superbe église qui reçut la consécration de la main du pape Alexandre II. Aujourd’hui encore, de nombreux pèlerins de la Bourgogne et de la Champagne accourent sur cette terre bénie, mais désolée; car le fanatisme protestant et le marteau révolutionnaire y ont faut de tristes ravages.
Déjà, au XVIIe siècle, la critique gallicane, «semblable, dit l’abbé Darras, au glaive du soldat romain, avait prétendu effacer le nom de sainte Colombe du souvenir des populations chrétiennes. Mais, grâce à Dieu, la reconnaissance publique a protesté contre le vandalisme d’une prétendue science, et le culte de sainte Colombe a survécu aux attaques des modernes dénicheurs de Saints.»
Une partie des reliques de sainte Colombe a été retrouvée, et leur translation a eu lieu le 31 août 1853, avec une pompe et une magnificence extraordinaires.
Elles furent portées au monastère d’où elles avaient été autrefois arrachées, et Mgr l'archevêque de Sens bénit la première pierre de l’église qui illustre aujourd’hui le tombeau de la patronne du pays Sénonais.
L’abbé V. G. Berthodmieu, Fêtes et dévotions populaires, Paris, Victor Sarlit, 1873