Bouquet spirituel:
9 novembre
Ce Martyr est un des plus célèbres de tout l'Orient, et les Grecs lui ont donné tant de louanges et ont bâti tant d'églises en son honneur, qu'il est juste que nous fassions connaître la grandeur de son mérite. On l'appelle ordinairement Tiro, qui veut dire nouveau soldat, pour le distinguer d'un autre Théodore, vieux soldat, fêté le 7 février. On l'appelle aussi l’Amaséen, à cause de la ville d'Amasée, où il a enduré le martyre.
Saint Théodore naquit en Syrie, à la fin du IIIe siècle. Il faisait partie d'une légion romaine qui avait établi son quartier d'hiver dans la ville d'Amasia, où les édits persécuteurs étaient exécutés sévèrement.
Le jeune soldat, plein de l'amour de Jésus-Christ, dédaigna, malgré le péril, de cacher sa foi, et, au contraire, il se fit une gloire de la professer publiquement; aussi fut-il présenté comme chrétien au tribun de sa légion. Celui-ci lui demanda comment il osait professer une religion proscrite sous peine de mort: "Je ne connais point vos idoles, répondit-il; j'adore Jésus-Christ, Fils unique de mon Dieu. Je vous abandonne mon corps; vous pouvez le déchirer, le mettre en pièces, le livrer aux flammes. Si mes discours vous offensent, coupez-moi la langue. Dès que Dieu l'exige, je suis prêt à faire le sacrifice de chacun de mes membres." Le tribun et les juges, affectant d'être touchés de compassion pour sa jeunesse, se contentèrent de le menacer et le laissèrent en liberté.
Théodore ne songea qu'à gagner des âmes à Jésus-Christ, à fortifier les autres confesseurs de la foi et à les animer au martyre; il poussa même le courage jusqu'à mettre le feu au temple de la déesse Cybèle. Ce fut en vain qu'on essaya de lui faire exprimer quelques regrets à ce sujet: il brava toutes les menaces, comme il se rit de toutes les promesses. Il fut alors fouetté très cruellement et enfermé dans un cachot, sans nourriture, pour y mourir de faim. La nuit, le Sauveur vint le visiter, lui promit de le nourrir d'un aliment invisible et le fortifia pour le dernier combat. Cette visite donna à Théodore tant de joie, qu'il se mit à chanter les louanges de Dieu, et des Anges vêtus de blanc vinrent unir leurs voix à la sienne. Les geôliers et les gardes, le juge lui-même, furent témoins du miracle sans se convertir.
On lui fit alors de belles promesses, et on lui dit que, s'il feignait seulement la moindre soumission, on le mettrait en liberté. Ayant répondu à ces nouvelles sollicitations avec une fermeté invincible, Théodore est alors déchiré avec des crochets de fer, on lui brûle les côtes avec des torches ardentes, puis on le condamne à être brûlé vif. Le vaillant soldat, placé sur le bûcher, se munit du signe de la Croix, et bientôt sa belle âme s'envola au Ciel.
Saint Grégoire de Nysse, frère de saint Basile le Grand, termine son éloge du Saint par ces paroles:
Ô bienheureux Martyr, nous voici tous rassemblés au bout de l'année pour adorer notre commun Seigneur et pour célébrer votre gloire par nos louanges; soit donc que vous soyez entre les chœurs des Anges devant le trône de la grandeur de Dieu, soit qu'on vous ait donné place parmi les Principautés et les Puissances pour y rendre des adorations continuelles à cette divine Majesté; laissez, s'il vous plaît, pour un moment, ces compagnies pour vous approcher de nous. Jetez vos regards sur nos sacrifices, et obtenez-nous une double grâce pendant que vous recevez une double joie et une double reconnaissance pour le sang que vous avez répandu, et pour la rigueur du feu que vous avez enduré.
Nous avons besoin de plusieurs assistances: faites pour nous auprès de notre commun Roi les fonctions d'ambassadeur et d'avocat. Nous craignons de grandes calamités, et nous sommes environnés de périls. Puisque vous êtes soldat, défendez-nous; et, puisque vous êtes martyr, parlez hardiment en notre faveur. Procurez-nous une paix ferme et solide, de peur que vos fêtes ne soient interrompues, et que les temples sacrés ne soient profanés par les sacrilèges de nos ennemis.
Nous avons jusqu'à présent éprouvé la force de votre protection; ne nous en privez pas maintenant qu'elle nous est nécessaire plus que jamais. Que si nous avons besoin d'une intercession plus puissante, intéressez pour nous les autres Martyrs, vos bienheureux frères. Pressez saint Pierre, sollicitez saint Jean, le disciple bien-aimé, afin qu'ils prennent le soin des églises qu'ils ont fondées.
Abbé Léon Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950; R.P. François Giry, Vies des Saints, T. IV, Paris, Victor Palmé, 1860.