Bouquet spirituel:
22 octobre
Saint Hilarion naquit en Égypte, de parents riches et païens. A quinze ans, éclairé des beautés de la foi chrétienne, il reçut le Baptême et, tout épris du désir de la perfection, courut au désert pour voir Antoine, dont le nom était déjà célèbre. A la vue du patriarche du désert, il s'écria: "Et moi aussi, Dieu me veut ermite!" Il vendit peu après le patrimoine de ses parents, qui venaient de mourir, et s'enfonça dans la solitude.
Le démon, furieux de voir un enfant égaler en ferveur les plus anciens anachorètes, lui déclara une guerre acharnée; il employa tous les moyens: la crainte, les coups, la séduction, les tableaux impurs, les apparitions d'animaux; l'ermite triompha de tout en multipliant ses austérités.
Un jour pourtant, Hilarion, chantant des psaumes, était distrait et ne priait que de bouche; le démon, fier de cette légère faiblesse du Saint, lui sauta sur le dos et se moqua de lui. Le solitaire s'humilia, pleura sa faute et profita de cette négligence pour redoubler d'ardeur au service du Seigneur. Cet homme, qui avait tant à souffrir du démon, reçut de Dieu le pouvoir de se venger de lui; on amenait de toutes parts des possédés à Hilarion, qui les délivrait des malins esprits.
Cependant, les foules accourant vers lui, attirées par sa réputation de sainteté, le Saint regretta sa solitude primitive: "Je reçois, s'écria-t-il, ma récompense ici bas; il faut aller me cacher pour prier et souffrir, si je veux me rendre digne de la miséricorde de Dieu." Quand il voulut partir, plus de dix mille personnes l'arrêtèrent par leurs larmes et leurs gémissements. Il réussit pourtant à s'échapper, mais le désert fleurissait sous ses pas, l'enthousiasme des foules le suivait partout.
Le Seigneur, prenant pitié de ses larmes, l'avertit de sa mort prochaine. Hilarion s'étendit sur une natte: "Sors, mon âme, dit-il, sors de ton corps, brise les derniers liens. Pourquoi tarder encore? Il y bientôt soixante ans que tu sers le Christ, peux-tu craindre la mort?" Et il rendit l'esprit. Digne émule du grand saint Antoine, il a mérité le titre de Patriarche des solitaires de la Palestine.
Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950