Bouquet spirituel:
13 juillet
On ne sait rien sur la naissance et les premières années de saint Eugène. Son nom apparaît pour la première fois dans l'histoire quand il est choisi pour évêque de Carthage, en 481, à une époque où le fanatisme arien, joint à la barbarie des Vandales, faisait, presque à coup sûr, de tous les évêques catholiques africains des martyrs de la vraie foi.
Sa conduite dans l'épiscopat fut celle d'un vrai pasteur des âmes. Malgré la pauvreté de son Église, il trouvait le moyen de répandre dans le sein des pauvres de si larges aumônes, que Dieu semblait multiplier à plaisir les ressources entre ses mains.
Hunéric, roi des Vandales, lui fit défendre de recevoir dans son église aucun chrétien de la race des Vandales ou en portant le vêtement; mais Eugène refusa d'obéir:
"La maison de Dieu, répondit-il, est ouverte à tout le monde; nul ne peut en chasser ceux qui y entrent." Ce fut le signal d'une affreuse persécution.
Dieu voulut prouver par un miracle éclatant la vérité catholique contre la fourberie de ses ennemis. Un aveugle de Carthage, nommé Félix, vint trouver l'évêque et lui dit: "Je viens ici sur l'ordre de Dieu, et je n'en sortirai pas que vous ne m'ayez rendu la vue." Eugène le repoussa d'abord avec bonté, protestant qu'il n'était pas homme à faire des miracles; mais l'aveugle insista; il lui fit alors un signe de Croix sur les yeux, qui s'ouvrirent aussitôt à la lumière. Peu après, il rendit la vue à un homme que l'évêque arien avait suborné pour se donner à lui-même la réputation d'un thaumaturge, et qui était devenu réellement aveugle au moment même où il jouait son triste rôle. Malgré le bruit de ces prodiges dans le pays, la persécution ne fit qu'augmenter.
Saint Eugène fut exilé; il eut à subir toutes sortes de mauvais traitements. Le persécuteur Hunéric, dévoré vivant par les vers, fut bientôt victime de la vengeance céleste; il périt en déchirant lui-même ses membres avec ses dents; ses entrailles lui sortirent du corps, et cette mort effrayante fit horreur à ceux mêmes des hérétiques qui avaient fait de lui un prince pervers et cruel.
Eugène put revenir à Carthage et y continuer son apostolat; mais la paix ne fut pas de longue durée, car, sous le second successeur d'Hunéric, la persécution sévit de nouveau; Eugène, toujours invincible, fut d'abord menacé des plus horribles supplices, puis envoyé en exil à Albi, dans les Gaules, où le vaillant athlète de la foi vit la fin de ses travaux.
Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l'année, Tours, Mame, 1950